Extrait de l'impasse

Coup de foudre 

Bien qu’enveloppée d’une clarté polaire, elle dégageait une sensualité brûlante. Chevelure plus brune n’était répertoriée dans la mémoire d'aucun coiffeur. Amandes si généreusement cillées qu'elles semblaient soulignées d'un vibratile trait de khôl, ses yeux remontaient comme ceux d’une chatte. Les iris taillés dans l'émeraude la plus vive, se diluaient dans une foultitude d’éclats mordorés aux abords des pupilles.

Saillantes et saumonées, les pommettes accentuaient l'irrésistible galbe de ce visage s'inscrivant comme une aubaine dans l'incrédulité de l'endroit. Ce miracle d'équilibre reposait sur la reliure nasale partageant en une irréprochable symétrie, le fuyant épanouissement des hémifaces composées de suaves inflexions, de tendres ruptures.

La tonique mobilité, les furtifs frémissements du cadre facial trahissaient l’ extrême réceptivité qu'accentuaient  de grandioses et sensibles ouvertures. Narines, bouche, yeux humaient, percevaient, vibraient, comprenaient. Il s'émanait de la jeune femme un raffinement sensoriel que contredisaient les lèvres charnues.  Mûres et longues cerises assoiffées de gourmandise.

Plus petite que Fabienne, elle était aussi plus fine, plus racée avec un indéniable surcroît de pétulance et de cérébralité. Sa maîtresse était belle certes, mais une beauté un peu amorphe, un peu rentrée, une beauté presque chevaline. Si la plastique de Fabienne attirait le regard, celle de Christelle le cinglait, en mêlant à la plénitude des formes cette grâce et cette vivacité d’esprit nous invitant à constater que Miss Camping, Miss Silicone et Miss Univers n'existent qu’à la faveur du somptueux désintérêt qu'inspire ce genre de manifestations aux anonymes vénus que l'on croise dans les rues ou à la cafétéria d'un centre d’handicapés.

Patrick existait si peu devant cette déesse qu'il s'étonnât que personne ne lui demande de payer l'air qu’elle daignait partager avec lui. Christelle feignit de ne pas s’en apercevoir. Son timbre mélodieux lui posta quelques interrogations portant sur son parcours. Durant les pitoyables réponses que l’asthmatique phrasé du jeune homme parvint à rapporter, elle avait aux joues cette soyeuse assurance dont aiment à se parer les séductrices et dont elles jouent comme d'un éventail pour dissiper les émois suscités tout en les attisant. Cet impalpable artifice n'était pas affiché, ni exhibé, il était cousu à sa photogénie comme l'était la fameuse robe de Marilyn  lors de l'anniversaire de Kennedy.

Patrick aurait pu réciter la bible ou chanter le bottin sur l'air de la Tosca, c'était égal. Tout en plissant les yeux comme pour en souligner la clarté, elle tentait de résoudre cette énigme masculine posée face à elle comme un échantillon de maladresse. Mais dès qu'elle sentait que ses prunelles offraient l'ombre d'une équivoque, elle les détournait sans tarder.

Elle était tellement inaccessible, qu'aucune illusion ne l'effleura. Lui voler un peu de son temps était déjà beaucoup. Quand il eut terminé, il chercha désespérément un prétexte capable d’épargner à son œil d’esthète la douleur d’un départ précipité. D’une voix assurée par un courtier en faillite, il la pria de lui expliquer la paralysie dans tous ses états.

Patricia Rezé-Rébulard 25.02.2022 12:25

J'aime beaucoup ce récit romantique d'une rencontre, de la description de la jeune femme aux émois qu'elle procure, tout en pudeur. Un beau jeu de séduction.

Chantal Delorme 22.06.2020 20:03

Magnifique texte, plus que des mots... Ce sont des images qu'on peut voir dans notre tête. Bravo!

christian chauffour 23.06.2020 05:31

merci chantal c'est trés gentil

christian chauffour 25.07.2018 16:57

merci joelle tu ne vois pas l'intérêt de comparer deux femmes moi oui puisque je l'ai fait

joelle fleury 25.07.2018 10:55

COUP DE FOUDRE : la précision des descriptions me ravit , ton humour aussi...par contre , quel intéret à comparer 2 etres humains , qui plus est , 2 femmes....

anne 07.02.2018 12:02

Tu as vraiment l'art de traduire l'indicible, de faire partager ton approche si sensible des êtres, dans un langage imagée qui en plus tu me fais rire ! Maerci.

Donã 04.12.2017 22:44

Texte bien soignée et la photo bien prisé au bon moment

jany 06.03.2017 13:57

Plaisir de lire, souffle coupé, je suis époustouflée !!! Magnifique , je reviendrai vous re lire encore et encore

cathy 02.02.2017 09:55

c'est super

samsam 24.01.2016 21:47

bonsoir
j'ai le plaisir de lire vous pages super photo
j'ai pas tout fini les autre pages
merci de votre invitation bonne soirée

dgidgi 04.11.2015 08:42

bonjour
c'est super agréable de venir lire chez toi
belles photos un peu partout au fil des pages et de beaux textes
merci

christian 04.11.2015 14:03

merci dgidgi
c sympa

Sylvain Beaudin 31.10.2015 14:21

Grandiose

sylviane vandamme 15.01.2015 16:32

c'est agréable a lire et d'une telle justesse:en un mot j'aime et n'oublions pas les phot'o

Commentaires

30.11 | 16:08

merci anna

10.09 | 13:07

Mince je suis coulrophobe...😉

18.07 | 11:55

J'aime

15.04 | 11:41

Chapeau mec tout y est, dans les moindres détails, une portée littéraire digne ...